mardi 14 décembre 2010

Accueil

J'ai l'impression que accueil et acceptation sont souvent confondus. Moi-même, je me surprends bien souvent dans le jeu d'une situation à vouloir accepter ce qui se passe, ce qui, à posteriori, me paraît absurde. De mon point de vue, accepter demande un effort et tout effort signe l'influence du mental sans parler de la "volonté" d'accepter.

Depuis plusieurs semaines, la présence d'une personne de mon entourage faisait s'élever de la peur en moi, en réveillant des souvenirs pénibles. La personne souffrait de ma réaction et voulait modifier son comportement pour me faire plaisir. Je ne cessais de lui dire qu'il n'avait rien à changer et que c'était à moi d'accepter la situation. Et bien, je n'arrivais absolument pas à accepter. Je n'acceptais pas ma réaction de peur et je me suis jugée : je n'étais pas contente de ne pas être capable d'accepter la situation. Lorsque la personne n'était pas là, tout allait bien, avec une certaine mesure d'arrière-plan, mais dès que j'étais avec elle, un rien réveillait la peur : j'avais l'impression de devenir folle ! 

Mais quand il a été vu et compris que je ne pouvais vraiment pas accepter, que mes conditionnements avaient le dernier mot, j'ai envisagé la fuite : ne plus voir la personne. Et là, ça a lâché ! Sur le moment, j'ai été très surprise : pourquoi l'envie de fuir me ferait lâcher prise ? Mais en fait, c'est d'avoir vu que je ne pouvais pas accepter la situation, et d'être prête à abandonner, qui a tout déconnecté. Depuis, je peux continuer à voir la personne sans que le souvenir et la peur associée ne soient réactivés. 

Ce n'est pas la première fois que cela se passe ainsi mais, à chaque nouvelle situation réveillant un souvenir et son cortège d'émotions associées, c'est une redécouverte.

Je vois que ce que je voudrais accueillir n'est pas vraiment la situation présente mais du passé.

Si je prends l'exemple d'un souvenir douloureux associé à une personne, à chaque fois que je vais voir la personne, le souvenir douloureux sera remémoré. Mais il me semble que l'idée n'est pas d'emblée de faire la paix avec le souvenir mais avec le vécu présent. Bien sûr, si le souvenir s'élève et qu'il peut être accueilli avant qu'une réaction n'apparaisse, tant mieux. Mais quand une réaction a eu lieu, accueillir le souvenir n'est plus accueillir le moment présent puisque le moment présent c'est la réaction. Ensuite, si un jugement de cette réaction s'élève, une fois encore le moment présent n'est plus la réaction (et encore moins le souvenir) mais le jugement de la réaction. Autrement, c'est comme si j'avais toujours un train de retard par rapport au présent.

Tel que je le vois, il ne s'agit donc pas de tout accepter mais plutôt d'être très bienveillant vis-à-vis de soi-même. Ne pas essayer de changer, se donner le droit de ne pas être "parfait". Comprendre intimement, réaliser, que ce corps-mental ne peut pas être autrement que tel qu'il est, avec tous ses souvenirs, ses réactions émotionnelles, ses jugements...

Bien sûr, ce n'est pas quelque chose qui se fait volontairement. C'est quand je me suis cognée contre tous les murs de ma prison mentale que la lutte s'arrête. Car ce n'est pas de vouloir en sortir qui m'en libère mais de reconnaître que j'y suis. Qu'il est drôle de voir ensuite qu'elle n'a aucune consistance. Et qu'elle n'a jamais eu aucune consistance ! C'est saisissant, une fois que le lâcher prise a eu lieu, de constater que ce qui me tracassait n'a pas plus de réalité qu'un rêve fait la nuit précédente...

4 commentaires:

  1. Christian Simard8 janvier 2011 à 14:35

    Le Soi n'est pas seulement Free from Action, il contient tout le champ de l'Action, ce qui veut dire l'univers perçu. Comme un rêve en lui. D'acceptance universelle, forcément. Peut-être t'arrive-t-il de sentir que ton champ d'action (toute ta réalité de l'état de veille) semble se dérouler dans une totalité silencieuse d'Être. Je crois que tu constates cela. Encore un peu plus et tu vas réaliser 'Oh, c'est Moi.' À ce moment tu vas savoir parce que ton intellect va être instantanément pulvérisé. C'est 'violent'. Les deux bras vont te tomber. Alors ce que tu penses être toi, peut importe ce qu'il est, libre ou pas dans l'Action, va te sembler totalement insignifiant. Non pas qu'il va cesser de vouloir de défaire de ses noeux, mais insignifiant dans ce qu'il est, ou ce qu'il peut à la limite devenir. Il sera en Toi, comme le reste de l'univers perçu, chéri parce que c'est lui qui perçoit l'univers. Pas le Soi. Le Soi est le Contenant. Ta personne est dans le contenu et expérimente le contenu. Insignifiant contenu comparé à l'inspacialité et l'intemporalité du Je.

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  2. Bonjour Christian,

    Merci pour tes commentaires et en particulier celui-ci qui m’est allé droit au cœur.

    Oui, il m’est arrivé d’être consciente que le Silence était là même dans le brouhaha des pensées. Mais le vécu que j’expérimente le plus est une conscience d’arrière-plan quand la mentalisation diminue, une conscience que de là où part le regard il n’y a rien, une transparence.

    Il m’est arrivé une fois, en discutant avec quelqu’un de réalisé, de réaliser soudainement que lui, c’était moi. Déconcertant !

    Ce que tu décris ensuite, même si cela a été entrevu lors d’aperçus, n’est pas intégré. Ce qui semble s’intégrer de plus en plus ces derniers temps prend une autre forme : c’est la compréhension que je suis déjà ce que je cherche.

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  3. Christian Simard8 janvier 2011 à 21:26

    Cette conscience pure, ou Soi, est d'abord localisé quand le mental s'apaise. De là, la prescription de la méditation. Alors le Soi est perçu comme une conscience pure d'arrière-plan, comme si à la source de la pensée. Mais éventuellement il reste localisé lorsque le mental est très actif, même agité. Et non plus comme arrière-plan, comme source de la pensée, du regard, mais comme contenant même de tout objet regardé (tes pensées, ton corps, l'environnement immédiat, et même les galaxies les plus lointaines, Tout ce dont le mental est conscient de est constaté existant et agissant en Soi. Self alone is.

    Si un individu réalisé parle de son moi véritable, il va dire I am That. Et ensuite tenter de le décrire. Ce qui est impossible. C'est pour ça qu'on dit That. I am That. On ne peut rien dire d'autre. But who are you? Just That. Mais si son language descriptif totalement abstrait résonne, c'est que tu vis That, même si pas pleinement. Because Thou art also That.

    Exact. Et déjà ou tu peux aller.

    Je suis tombé sur ce blog par hasard, parce que posté sur mon Facebook. C'est beau et bien. Salut à toi.

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  4. Merci.

    Je suis ravie de cet échange.

    Au plaisir de te lire à nouveau.

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Il n’est pas nécessaire de réfléchir pour faire quoi que ce soit. Même pour faire un exercice de physique, la réflexion n’est pas nécessaire...